Actualité juridique pénale
Michèle Bernard-Requin, qui avait ému la France, est morte
La magistrate, décédée samedi des suites d’un cancer, nous avait adressé il y a quelques jours un texte poignant, que nous republions.
Vendredi 6 décembre 2019, dans un message qui me hantera longtemps, cette grande dame de la magistrature m’avertissait qu’elle vivait ses derniers jours. « Je vais vous faire envoyer par l’intermédiaire de ma fille un texte auquel je tiens énormément. Il est un petit peu particulier, mais j’aimerais tellement qu’il passe dans Le Point.fr. Je ne vous cache pas que je n’ai pas beaucoup de temps devant moi, mais je voudrais au moins apporter cette aide à l’une des choses qui marche bien en France et qui est compromis faute d’argent. »
D’une voix forte, digne, mais essoufflée, Michèle Bernard-Requin formulait ici sa dernière prière. Elle fut évidemment exaucée. Sa fille Laurence eut le temps de lui lire les dizaines de messages qui accompagnaient son dernier texte. Ses lignes ont ému la France entière. Sa disparition laissera un grand vide au Palais, où cette septuagénaire n’a laissé que de bons souvenirs. Révélée au grand public grâce au documentaire de Raymon Depardon (Délits flagrants, sorti en 1994), elle ne cessait depuis lors d’expliquer dans des livres et des émissions de télévision avec passion et clarté les ressorts, difficultés et enjeux de la justice. Filmée une deuxième fois par Depardon en 2014, dans le film documentaire 10e Chambre, instants d’audiences, elle s’était rendue dans les lycées et d’autres établissements pour accompagner la diffusion du film, expliquant trouver utile de faire de la pédagogie sur le fonctionnement de la justice, bien que le regard sur celle-ci ne puisse que « difficilement changer ».
L’indépendance du procureur en question
Jusque-là, la France avait argué que l’article 30 de la loi du 15 août 2013, qui supprime les instructions orales venant de l’exécutif, réglait la question et témoignait de l’indépendance du procureur français.
L’argument est désormais intenable pour l’avocat général de la Cour de Luxembourg, qui relève que si «le ministère public français n’est plus soumis aux éventuelles instructions individuelles du pouvoir exécutif,le ministre de la Justice peut continuer à lui donner des instructions générales. D’autre part, la structure hiérarchique caractéristique du parquet suppose une subordination à des supérieurs hiérarchiques».
Date: 16 décembre 2019
Titre: Le Point
Auteur: Jérôme Béglé
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Catégorie: Actualité juridique pénale