La montagne a accouché d’une souris : après six années d’une enquête fleuve, les trois surveillants de la prison de Maubeuge, soupçonnés d’avoir été complice d’un trafic de stupéfiants avec des détenus, ont été relaxés ce mardi par le tribunal d’Avesnes-sur-Helpe.
« C’est une farce, un naufrage ! », s’emporte Steeve Ruben, l’avocat de la défense. De manière méthodique, durant plus d’une heure, le ténor parisien va démonter point par point la procédure.
Debout face à la barre du tribunal, ils n’ont manifesté aucune réaction à la lecture du délibéré. Soulagés d’être relaxés certes, mais ces trois surveillants de la prison de Maubeuge ont toujours en travers de la gorge six années d’instruction à la tonalité kafkaïenne, durant lesquelles ils ont été « traînés dans la boue. »
« Ce dossier porte tous les stigmates des dérives de la procédure inquisitoire », s’emporte Romain Soual, l’avocat de l’un d’eux. Le point de départ des investigations trouverait son origine dans une « vague rumeur », des « bruits de coursives » montés en épingle selon le conseil. Dès 2017, une vingtaine de détenus ont accusé les surveillants de participer à un trafic de stups dans les murs du centre pénitentiaire. A minima, ils auraient fermé les yeux pour permettre au réseau de prospérer. Dans le pire des cas, les témoignages affirment que les fonctionnaires ont participé activement en ouvrant des portes pour permettre les livraisons de drogue ou en laissant les « cerveaux » régler leur compte avec les mauvais payeurs.
Destruction professionnelle
Où sont les preuves ? Voilà le talon d’Achille de l’enquête. « Tout le monde sait mais personne ne voit », raille maître Soual. Les policiers n’ont jamais retrouvé chez les agents le moindre flux financier suspect ou une quantité de drogue qui aurait pu corroborer les accusations. Pour ne rien arranger, les vérifications ont prouvé que les surveillants n’étaient pas en service aux dates où ils étaient censés avoir aidé les narcotrafiquants.
« L’ensemble des ingrédients était réuni dans la procédure pour aboutir à la relaxe, déplore Jérôme Szafran, autre avocat des mis en cause. Ils n’auraient jamais dû être renvoyés devant le tribunal. Rien ne pourra réparer la destruction personnelle et professionnelle qu’ils ont subie. »
Une farce, un naufrage !
Reste maintenant le cas de ces deux détenus assis dans le box, présentés comme les têtes de réseau. La procureure de la République estime qu’ils ont bien dealé de la drogue en prison. Elle requiert une peine de cinq et quatre ans de prison à l’encontre de ces deux Maubeugeois bien connus de la brigade des stups.
Là encore, le dossier pèche par son manque d’éléments tangibles. « C’est une farce, un naufrage ! », s’emporte Steeve Ruben, l’avocat de la défense. De manière méthodique, durant plus d’une heure, le ténor parisien va démonter point par point la procédure. « Les recherches patrimoniales sur mon client n’ont rien donné, les fouilles dans les cellules n’ont pas été probantes, les caméras de surveillance de la prison n’ont pas été exploitées ! ». Reste donc des témoignages. Steeve Ruben prévient « La rumeur, c’est bien pour le café du commerce, pas devant un tribunal judiciaire. »
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- Date: 3 juillet 2024
- Titre: La Voix du Nord
- Auteur: Morad Belkadi
- Photo: Sami Belloumi – VDNPQR
- Catégorie: Articles de presse