Actualité juridique pénale
Avec ou sans Benalla, il y a un gros problème avec notre police
L’affaire Benalla devenue affaire Macron éclate à la gueule du “nouveau monde” souriant et méprisant que l’on nous vend depuis plus d’un an. S’en est finit du mythe de la droiture du président, de son “humanisme” et de son sens moral. Macron ne vaut pas mieux que Sarkozy : lui aussi est un petit rejeton de la bourgeoisie avide de pouvoir et obsédé par le fric. La seule différence c’est qu’il a su séduire la bourgeoisie médiatique et culturelle en se la jouant philosophe et ami des arts quand le second scandalisait le petit monde parisien par ses mauvaises manières. Dans le poulailler de nos élites, les plumes volent et cela s’agite en tout sens : leur candidat, leur héros, le porte-flingue de leurs intérêts du moment ne va bientôt plus rien valoir aux yeux du peuple et sa “courageuse action réformatrice” va devoir s’interrompre en attendant le prochain candidat prêt à nous berner le temps de faire passer les bonnes ordonnances.
Mais il y a quelque chose de dérangeant et de choquant dans les propos tenus un peu partout depuis trois jours : Benalla, usurpateur d’identité de la police, “salirait” son image. Les VRAIS policiers eux, font bien leur travail. Voilà ce qu’on lit et entend depuis que le cataclysme a commencé.
Pardon ? Vous pouvez répéter ? “Les policiers se comportent bien” en temps normal ? Dire une chose pareille sans sourciller implique d’avoir hiberné ces dix, vingt ou trente dernières années et d’avoir une interprétation bien étrange de ce qu’il s’est passé le 1er mai.
Car “l’affaire” elle-même en dit long sur le sens de l’éthique de la “déontologie” de notre police. Le nervis de l’Elysée n’a pas profité d’une porte de fourgon mal fermée pour subtiliser un casque. On lui a donné. La hiérarchie policière présente sur place a couvert l’opération menée par Benalla et deux autres sbires de l’Elysée. Elle leur a accordé le droit de partager avec ses hommes le plaisir raffiné de frapper et de traîner au sol des jeunes hommes et des jeunes femmes. Des gradés ont poussé le zèle a fournir ensuite des copies de la vidéosurveillance de la rue ! Pour expliquer une telle situation, un représentant de cette digne profession ose dire « L’Elysée, ça fout la trouille à tout le monde » (Philippe Capon, du syndicat de gardiens de la paix UNSA-Police). Par contre, voir quelqu’un étrangler un manifestant et lui donner un violent coup de pied alors qu’il est à terre et sans défense, ça fout la trouille à qui dans la profession ? Pas grand monde visiblement.
Ensuite, il faut avoir la décence et le réalisme d’affirmer que les VRAIS policiers chargés du “maintien de l’ordre” savent faire aussi bien que leur indigne usurpateur mais s’en est tellement habituel que nos chers “leaders d’opinion” s’y sont visiblement habitué : Quand le jeune militant de la France Insoumise a diffusé sa vidéo le jour du premier mai, ça n’a pas ému grand monde parmi la presse, comme s’il était acquis que la police a “le monopole de la violence gratuite et acharnée légitime”.
Et ce n’est pas la famille Traoré qui dira le contraire, ni celle de Théo. La violence gratuite de la police, les habitants des quartiers populaires y sont habitués. Ils sont aussi habitués à l’indulgence de nos élites de tout bord et de toute rédaction : le combat contre les violences policières passe pour une niche d’extrême-gauche, un dossier lassant dont on se sent obligé de parler un peu quand la mort est au rendez-vous.
Faire le procès de Macron, de son équipe et de ses pratiques oui. Faire le procès de notre police, de ses violences gratuites, de ses accointance avec l’extrême-droite (car même les services de renseignement s’en inquiètent), ce serait aussi le moment. Cessons de croire qu’assurer notre sécurité implique nécessairement de lâcher la bride juridique et morale à toute une profession. On est en droit d’exiger une police qui ne frappe pas des sans raison, qui ne fasse pas de contrôle au faciès, qui permette aux victimes de viols et d’agression de se sentir légitime à porter plainte et qui exerce sa mission sous contrôle citoyen et non sous la coupe d’hommes de main du président.
L’heure du grand ménage a sonné. Tâchons de ne pas laisser de la poussière dans les coins.
Date: 23 juillet 2018
Titre: frustrationlarevue.fr
Photo: Jacques Tiberi : Pixabay
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