Actualité juridique pénale
François Sureau : « C’est le citoyen qu’on intimide, et pas le délinquant »
L’avocat et écrivain, proche de Macron, lance un réquisitoire contre le texte, qui sera voté mardi.
François Sureau est avocat aux conseils, écrivain, auteur de notamment Le Chemin des morts (Gallimard, 2013) et de L’Obéissance (Gallimard, 2007). Ses plaidoiries devant le Conseil constitutionnel contre l’état d’urgence ont été publiées sous le titre de Pour la liberté. Proche du président de la République, Emmanuel Macron, il lance ici un réquisitoire contre la loi « anticasseurs » du gouvernement.
Que vous inspire la loi « visant à prévenir les violences lors des manifestations » qui doit être votée mardi 5 février par les députés ?
Ce texte n’a pas pour objet de mieux réprimer les auteurs d’actes violents après qu’ils les ont commis. Il établit en revanche un véritable contrôle administratif du droit de manifester. Si l’on est attaché aux libertés, on ne peut pas l’admettre.
Cette « loi de la peur », comme il y a eu une loi du « sacrilège » sous la Restauration, vise à prévenir en réalité le retour du sacrilège commis contre les institutions. Mais la démocratie ne tient pas à des objets matériels, une statue sous l’Arc de triomphe, une porte de ministère. Elle tient à des choses plus invisibles, et c’est à celles-là que le gouvernement s’attaque.
Il est porté dans cette entreprise par un fort courant hostile aux libertés, qui s’appuie sur chaque débordement particulier pour demander la suppression d’une liberté en général. Ce courant est ancien, Chateaubriand en parlait devant Napoléon lui-même, disant en 1811 : « La mode est aujourd’hui d’accueillir la liberté d’un rire sardonique, de la regarder comme une vieillerie tombée en désuétude. »
Date: 4 février 2019
Titre: lemonde.fr
Auteurs: Solenn de Royer
Photo: © Samuel Kirszenbaum/Modds
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