Laurent Gimel, qui assure avoir, il y a 20 ans, « arrosé » en billets verts le plus grand quartier d’affaires d’Europe, est de retour en France. Le jour de son procès.
Il fut une époque où l’argent liquide, les valises de cash et les enveloppes bien garnies étaient tellement courants au siège de la société Juben Holdings, que la secrétaire du patron, Laurent Gimel, raconte aux policiers « s’être amusée, avec sa collègue, à confectionner une ceinture et une jupe en billets verts ». Nous sommes alors au début des années 2000. Le gigantesque marché de chauffage et de climatisation du quartier d’affaires de La Défense s’apprête à être renouvelé. Avec de forts soupçons sur la sincérité du scrutin.
L’enquête a duré plus de 19 ans et, Le Point l’a raconté, l’affaire n’arrive que maintenant, en 2020, devant le tribunal correctionnel de Nanterre, alors qu’un des prévenus va bientôt souffler ses… 98 ans. Un dernier homme, que l’on n’attendait plus, vient pourtant de s’inviter aux festivités judiciaires : Laurent Gimel, 59 ans, sous mandat d’arrêt depuis 2013, celui-là même qui avait raconté aux policiers, voilà des années, comment il faisait venir massivement du cash du Luxembourg via un hélicoptère ou un chauffeur personnel pour « arroser tout le monde ».
Scandale dans les Hauts-de-Seine
Gimel, qui vit au Maroc, a obtenu la levée du mandat d’arrêt qui avait été prononcé à son encontre pour venir assister à son procès à partir du lundi 21 septembre, au tribunal correctionnel de Nanterre. L’homme a toujours affirmé aux policiers avoir été approché pour créer un montage financier, avant d’être chargé par ceux qui avaient obtenu le juteux marché du chauffage a toujours affirmé aux policiers avoir été approché pour créer un montage financier, avant d’être chargé par ceux qui avaient obtenu le juteux marché du chauffage de La Défense, de graisser les pattes et de verser quelques pots-de-vin aux décideurs, en particulier à l’ancien maire de Puteaux et sénateur Charles Ceccaldi-Raynaud, décédé en 2019.
Alors que les mis en cause ont toujours nié avoir reçu ou connu l’existence de tels « pots-de-vin », en pointant des inexactitudes ou des invraisemblances dans le récit de Laurent Gimel, lui a toujours maintenu qu’il avait versé entre trois et cinq millions de francs, via un système de fausses factures. La justice n’est cependant pas parvenue à trouver les preuves matérielles se rattachant à ces versements.
Guerre chez les Ceccaldi-Raynaud
L’affaire, révélée par Mediapart et Le Canard enchaîné, avait en tout cas semé un vent de panique dans les Hauts-de-Seine. Feu Charles Ceccaldi-Raynaud, devant la police, avait nié avoir obtenu de l’argent illégal, affirmant que c’était sa fille, Joëlle, l’actuelle maire de Puteaux, qui avait bénéficié de ces largesses, via un compte caché au Luxembourg.
Les investigations ont effectivement permis de retrouver la trace de ce compte et… d’une centaine de lingots d’or. Plusieurs enquêtes visant Joëlle Ceccaldi-Raynaud ont été ouvertes. La femme politique n’a cependant pas été mise en examen dans l’affaire du chauffage de La Défense, les juges n’ayant pas réussi à déterminer, avec certitude, l’origine de son immense fortune — elle jure avoir perçu un héritage. Contacté, Me Steeve Ruben confirme :
« Mon client, qui ne s’est jamais considéré comme un fugitif, comme certains ont pu l’écrire, est bel et bien de retour pour s’expliquer devant ses juges. »
- Date: 19 septembre 2020
- Titre: Le Point
- Auteur: Marc Leplongeon
- Photo: Derrick Ceyrac / AFP
- Catégorie: Articles de presse