Actualité juridique pénale
Robert Badinter : « La recherche de l’innocence, c’est une quête abominable »
Robert Badinter se raconte au micro de Dominique Varenne dans ce « Contre-champ » diffusé en 1970 sur France Culture. Il revient sur ses débuts dans la profession d’avocat, explique les qualités requises par ce métier et conclut en donnant sa conception de la justice et de la liberté.
En novembre 1970, Robert Badinter, avocat à la cour, professeur agrégé de droit, est l’invité de l’émission « Contre-champ ». Il commence par raconter pourquoi il a entrepris de se mettre au droit pour devenir professeur à l’Université alors qu’il était avocat, « c’est mon petit Anapurna universitaire à moi ». S’il est arrivé au droit, « c’est presque un hasard, une bifurcation à un moment donné ».
Je trouvais le droit une discipline à la fois peu intéressante et trop facile. J’ai changé d’avis beaucoup depuis.
C’est aussi le hasard qui a fait se rencontrer Robert Badinder, « je n’avais pas du tout de clients » explique-t-il et Jules Dassin lequel « n’avait pas du tout d’argent ». Et c’est ainsi qu’il s’est lancé dans le droit cinématographique et s’est occupé d’une affaire de droit d’auteur concernant Charlie Chaplin qu’il a gagnée.
Je dois dire que j’ai eu toutes les chances. Toutes les chances que la vie professionnelle peut offrir à un jeune avocat, je les ai connues. Il faut que j’en porte témoignage, la chance a joué pour moi d’une façon considérable pendant toute ma jeunesse professionnelle.
Robert Badinter insiste sur la qualité essentielle d’un avocat, « le courage », car « dès l’instant où vous commencez à céder le terrain, vous êtes perdus ». Il évoque avec force la plaidoirie de l’avocat, ce moment où « ce qu’il reste de chance à celui qui est derrière vous, c’est uniquement ce que vous allez dire, c’est uniquement l’effort que vous allez faire. Et quand vous vous levez, vous êtes tout seul. Vous êtes tout seul et vous le sentez. »
L’ennui c’est que je ne me souviens pas d’avoir jamais, sauf peut-être une ou deux fois, quitter – quand il m’arrive d’en faire – la salle des assises ou même une chambre correctionnelle sans avoir un goût de cendre. Parce qu’on a toujours l’impression qu’on n’a jamais été à la limite, au bout de ce qu’on pouvait faire. Et ça c’est terrible.
Date: 20 octobre 2017 – 1re diffusion : 26.11.1970
Titre: France Culture – Archive INA Radio France
Auteurs: Olivier Bénis, Lorélie Carrive
Photo: © STF – AFP
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